Maryam Mahdavi & Yoxeone : un duo créatif
Architecte d’intérieur, styliste, designer et scénographe, Maryam Mahdavi est une habilleuse de maisons. Pleine de paradoxes, elle aime le politiquement incorrect et tout ce qui est fantasque. Ce qui explique qu’elle ait accepté, comme un clin d’œil, de signer avec Sélim Gouaned, créateur de la marque Yoxeone, « La Cerise sur le Gâteau ». Alors que rien ne les prédestinait à se rencontrer, ils réalisent une collection capsule très rock’n roll.
L’univers de Maryam est coloré. Elle ose les mélanges donnant une identité et une vraie signature à ses réalisations. Elle aime l’insouciance, la provocation et s’inspire des univers underground, façon studio 54 et Château Marmont. Ces temples du glamour, qui ont vu défiler les plus grands artistes, parmi lesquels Andy Warhol, Keith Haring et Jean- Michel Basquiat. Un brin provocante, elle aime aussi travailler la laideur et tout ce qui n’est pas évident. En résumé, rien ne lui fait peur et elle le revendique.
Maryam Mahdavi la provocante
Êtes-vous l’ambassadrice du chic extravagant ?
Ce n’est pas faux ! L’extravagance fait partie de mon ADN, avec un soupçon de décadence quelque peu aristocratique. Le chic tout court ne m’irait pas, car il y a autre chose derrière, mais il faut creuser.
Qu’est ce qui vous inspire à chaque nouveau projet ?
L’inspiration est comme une énergie qui me booste, je suis très animale, je ressens les choses. Sans prétention, nous les artistes, avons le flair pour mettre en avant ce dont la grande majorité va avoir envie. Alors, bien entendu, c’est aussi un éternel recommencement. Comme des madeleines de Proust, tel le léopard ou le camouflage qui reviennent régulièrement dans nos gardes-robes et se glissent de temps à autre dans nos intérieurs. Mais une grande partie de mon inspiration vient de la couture et du corps. Je regarde beaucoup les défilés de mode. J’aime la manière dont les vêtements bougent sur nous et agissent sur nos attitudes. Je ne travaille d’ailleurs pratiquement qu’avec des tissus fabriqués pour la mode.
Parlez-nous de votre rencontre improbable avec Sélim Gouaned ?
Entre deux rendez-vous, j’aime beaucoup marcher dans le quartier des Tuileries. Je parle aux arbres, cela me régénère. Et lorsque mon emploi du temps me le permet, j’aime m’asseoir à la terrasse d’un café et observer. Interpellée par certains mots qui émanaient des échanges de mes voisins, j’ai fini par me mêler à leur conversation. Nous avons parlé de l’esthétisme, de la transmission et des changements que subit le monde. Une chose en entraînant une autre, nous avons évoqué nos occupations respectives et Sélim m’a invitée à découvrir son univers et ses créations. Je dois admettre que, généralement, je n’accepte pas ce genre d’invitation, mais là mon instinct m’a poussée à dire oui. Nous nous sommes recroisés quelques jours plus tard, et Sélim m’a proposé de tenter l’aventure sur une collection capsule. Bien que surprise, j’ai spontanément accepté. Restait à savoir ce que nous allions faire ensemble.
De quoi est composée cette collection ?
Dans un premier temps, Sélim a eu l’idée de créer un blouson perfecto avec des manches lacérées, réalisé à partir d’un vieux tapis persan que m’avait légué ma grand-mère. Le second objet est une customisation de ma table, « Soupçon ». Pour l’occasion, Sélim l’a entièrement habillé de cuir de couleur or rose, avec un zip qui évoque une combinaison à la Farah Fawcett. Et enfin, la dernière pièce, est une création signée Maryam Mahdavi Design. Il s’agit d’une chaise baptisée « La Cerise sur le Gâteau » qui vient accidenter tout cela et qui correspond à mon ressenti par rapport à cette collaboration.
Maryam Mahdavi, que vous apporte cette collaboration avec Yoxeone ?
Confidence pour confidence, c’est la première fois que j’entreprends une telle collaboration. Jusque-là, mon nom était surtout associé à des maisons comme Ikéa, Global Communication, Chanel et plus récemment Léonard. Mais là, je me suis dit qu’il était peut être temps de tendre la main aux jeunes, de les emmener dans la lumière et de leur donner la chance d’être reconnu à leur juste valeur. Il s’agit avant tout d’un partage, car si je transmets mon savoir, j’ai aussi beaucoup appris de Sélim. Cela m’a confirmé qu’il fallait savoir rester humble en toute circonstance et qu’il fallait suivre son instinct et revenir à des choses essentielles. Cela m’a également permis de davantage laisser libre cours à ma folie et de retrouver le côté rock’n roll, voir punk de mes débuts.
La transmission est-elle importante pour vous ?
Oui, bien entendu, mais cela fonctionne dans les deux sens. Il ne faut jamais oublier que nous sommes sur terre pour faire passer des messages. Et le faire entre deux univers, telle la collab’ entre Maryam Mahdavi et Yoxeone, qui à priori sont à l’opposé l’un de l’autre, est plus extraordinaire encore.
Que représente le design pour vous ?
C’est un très joli mot, que l’on utilise à mon sens à tort et à travers et qui n’a plus vraiment de sens.
Quels sont pour vous les liens entre la mode et la décoration ?
L’un est la continuité de l’autre et ne va pas sans l’autre.
Vous venez d’investir un nouveau lieu, pouvez-vous nous en parler ?
En effet, je viens de m’installer dans un lieu, que sans prétention, je qualifierais de royal. J’ai tout de suite été séduite et inspirée car il m’a évoqué le film « Les Yeux de Laura Mars », avec Faye Dunaway. C’est un loft, un type d’espace sur lequel je n’ai jamais travaillé, et dans lequel je développe un projet avec des idées encore plus décalées et plus accidentées. J’y raconte une nouvelle histoire toute en émotions et traite la couleur comme une sorte de make-up. J’y ai injecté de l’humour, du sexe, du danger, le tout un peu décadent, très rock, mais toujours chic. Pour mener à bien ce projet, je me suis associée à Codimat, avec qui j’ai travaillé sur les archives pour habiller les sols tout en « construction-déconstruction ». Et à Ressource, avec qui je travaille sur un autre projet sur les peintures.
Votre maison est un véritable monde en soi..
Oui, en effet, c’est mon monde à moi, mon showroom, mon atelier, mon laboratoire. J’y suis un peu comme le professeur Tournesol, je construis et je déconstruis en permanence.
Mélanger atmosphères, couleurs et impressions est-ce votre signature ?
Absolument ! J’adore jouer avec le mauvais goût. Ma règle d’or étant de ne pas avoir de règle. Tout est possible. J’aime les choses dont les autres ne veulent pas. Puis, tout déconstruire pour le reconstruire, oser les associations de prime abord improbables. Mes projets ressemblent à des scénarios où se retrouve tout ce que je suis, d’où je viens tout en étant à l’écoute du monde extérieur et rendre les choses plus belles. Voilà ce qui m’amuse…
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